Dans le cadre d'une succession, l'attribution préférentielle permet d'éviter le morcellement ou l'indivision du bien afin d'assurer la continuité et la pérennité de l'exploitation agricole.
1) Demander l'attribution préférentielle
À la suite d'un décès, les héritiers ont des biens en commun. Il s'agit d'une indivision successorale.
Les membres de l'indivision sont les co-indivisaires et sont les propriétaires des biens de l'indivision. Cependant, ils ne sont pas propriétaires exclusifs du bien mais d'une quote-part de la masse indivise. En général, cette situation ne simplifie pas la gestion du bien.
Aussi, selon le principe « Nul ne peut être contraint de rester dans l'indivision » (article 815 du code civil), chaque indivisaire a la faculté de provoquer le partage des biens successoraux. Le risque, c'est la division de l'exploitation agricole.
La loi a prévu pour un ou plusieurs co-indivisaires de pouvoir s'opposer à la division en demandant l'attribution préférentielle. C'est une modalité de partage des biens. Elle consiste à attribuer un bien à un copartageant alors même qu'il n'y a pas, pour les autres, de biens de valeur équivalente dans la masse indivise.
Son objectif est d'éviter le morcellement des biens, d'assurer la continuité économique et ainsi permettre la pérennité de l'exploitation familiale.
2)En propriété ou en jouissance
On distingue deux régimes d'attribution préférentielle.
L'attribution préférentielle en propriété peut se faire directement à l'exploitant poursuivant l'activité agricole. À défaut d'accord amiable, il doit la demander en justice.
Un groupement foncier agricole (GFA) peut en bénéficier. Il est ainsi possible de maintenir l'exploitation familiale sans imposer à l'héritier exploitant de verser une soulte à ses frères et soeurs. L'accord de tous les co-indivisaires est préalable.
L'attribution préférentielle en jouissance consiste à octroyer un bail à long terme (dix-huit ans) à l'héritier souhaitant poursuivre l'exploitation. Elle est accordée lorsque l'attribution en propriété n'est pas possible, par exemple, lorsque l'héritier exploitant ne peut pas verser la soulte aux cohéritiers.
CE QUE DISENT LES TEXTES
- Les personnes pouvant bénéficier de l'attribution préférentielle sont le conjoint survivant du défunt ou ses héritiers.
Ces personnes doivent participer ou avoir participé à la mise en valeur de l'exploitation (article 831 du code civil). Mais la loi n'impose pas au bénéficiaire de poursuivre l'exploitation.
- Selon la jurisprudence, la participation effective et la mise en valeur d'une entreprise agricole se caractérisent par une activité régulière et elles impliquent une aptitude à gérer correctement le bien (arrêt de la Cour de cassation du 23 avril 1985).
Le tribunal peut refuser l'attribution si le bénéficiaire ne présente pas toutes les qualités requises en matière de gestion d'une ou partie d'exploitation agricole.
- Seule l'attribution préférentielle de petite et moyenne exploitation peut être imposée par la loi au profit du demandeur (article 832 du code civil).
- Le demandeur de l'attribution copropriétaire bénéficiera en priorité des bâtiments d'exploitation agricoles et de la maison d'habitation. Le demandeur ne pourra faire valoir l'attribution que sur une partie de l'exploitation en fonction de la notion d'entité économique qui varie selon la nature de l'exploitation, sa dimension, sa productivité et son mode de gestion.
- D'une manière générale, l'attribution préférentielle est acceptée si l'exploitation agricole constitue un ensemble cohérent. Une maison d'habitation et un corps de ferme peuvent convenir à un exploitant seul et donc être considérés comme une entité économique, et bénéficier ainsi de l'attribution préférentielle, et peuvent, par ailleurs, être insuffisants pour un couple d'exploitants.
Le juge doit tenir compte de ces éléments dans sa prise de décision.