« C’est au tour de la nouvelle génération de se lancer »
réservé aux abonnés

Après avoir su évoluer et se développer en cohérence avec une conduite d’élevage très efficace, le Gaec du Bois Lecomte aborde désormais un nouveau virage avec l’installation des enfants des associés en place.
Vous avez parcouru 7% de l'article
en profitant de 2 mois de découverte à L’éleveur laitier
(Offre sans engagement, réservée aux personnes non abonnées)
![]() |
|
En juillet 2018, après un BTSA et une expérience salariale au service de remplacement, Christophe De Deken, 28 ans, a rejoint le Gaec du Bois Lecomte créé par ses parents, Maurice et Maria, et Camille Meuraut. À cette occasion, il a repris une ferme de 46 ha distante de 11 km, dont le cheptel s’est révélé 100 % positif à l’IBR. Pas de possibilité donc de regroupement de troupeaux pour cette première année d’installation : le jeune éleveur trait sur cette exploitation, dans l’attente de réformer progressivement les 63 vaches reprises, ce qui devrait aboutir fin juillet 2019. Une situation pas idéale pour débuter. Mais les génisses pourront intégrer le projet d’agrandissement ambitieux engagé par le Gaec : la construction d’une stabulation pour passer de 140 à 250 vaches, traites par quatre robots, avec une unité de microméthanisation. « Le robot répond à des enjeux de qualité de vie, souligne Christophe. Nous en sommes encore à l’étape des devis. L’objectif est de mettre en service les nouveaux bâtiments au cours de l’hiver 2020. »
« Nous avons déménagé de Belgique en tracteur ! »
Il sera rejoint par Aristide Meurant (27 ans) qui doit prendre alors la succession de son père Camille (60 ans). C’est donc un renouvellement de génération qui se prépare : pour Maurice et Maria, 60 ans tous les deux, accompagner les jeunes apparaît comme le dernier projet d’une carrière bien remplie. « Les projets ne nous ont jamais fait peur et nous serons toujours là pour aider mais, désormais, c’est aux jeunes de se lancer », assure Maurice. Son départ à la retraite est prévu dans un peu plus d’un an, celui de son épouse dans cinq-six ans. Des calculs d’équivalence avec la MSA devront valider leur expérience belge. Car le couple est natif de Belgique, plus précisément des Flandres. C’est en 1989 qu’il décide de s’installer en France, après six années sur l’exploitation familiale près de Bruxelles, où il produisait 200 000 litres de lait sur 30 ha. « Là-bas, la ferme était coincée entre les maisons, dans un cadre urbain imposant de déplacer les vaches en bétaillère, explique Maurice. Le morcellement et la pression foncière offraient très peu de possibilités d’évoluer. »
Après trois visites organisées par une agence immobilière, ils s’installent à Landrecies, à une trentaine de kilomètres de la frontière, où ils achètent le corps de ferme, le troupeau frison, un peu de matériel vieillissant et démarrent avec un quota de 330 000 litres, sur 76 ha. L’investissement s’élève à 2,8 millions de francs. « Ce fut une aventure, se souvient Maria. Nous avions 30 ans, j’étais enceinte et Maurice ne parlait pas français. Nous avons vendu le troupeau et le corps de ferme en Belgique, avant de déménager en tracteur ! »
Cinq ans après son installation, le couple monte un atelier volailles en 1994, doublé en 1999. Entre temps, le Gaec est créé en 1996 avec Camille, qui produisait 140 000 litres sur 38 ha, à 1 km. La stabulation de 84 places est bâtie en 2000. En 2007, le Gaec reprend une ferme à Catillon (9 km) où il développe un troupeau de 20 limousines. Mais le manque de rentabilité et la distance les conduisent à cesser cet atelier dès 2017, libérant ainsi de la place en vue de l’agrandissement du troupeau laitier (la vente des animaux est enregistrée au compte de résultat).
« Pas de limites sur les livraisons de lait chez Milcobel »
« Au fil des années, nous avons aussi fait des achats de TSST pour arriver à 750 000 litres à la fin des quotas. Depuis, Milcobel nous laissant toute liberté sur les volumes, nous livrons près d’un million de litres, sur 174 ha de SAU, divisés en trois sites, dont deux consacrés aux génisses. » En effet, la coopérative belge où ils livrent collecte sans limite tous les volumes de ses adhérents. C’est aussi cette stratégie qui permet au Gaec d’envisager un projet d’agrandissement important. La contrepartie est un prix du lait au plus près du marché, très volatil. Dans ce contexte, le Gaec tire profit des phases de conjonctures favorables pour épargner et respecte une stratégie économe, fondée sur la valorisation des ressources disponibles : ainsi, même lorsque le prix du lait est élevé, ils maintiennent le coût alimentaire en dessous de 70 €/1 000 l, mais n’hésitent pas à surcharger le bâtiment à 110 % pour augmenter les livraisons. « La recherche de la meilleure marge, c’est l’esprit flamand, plaisante Maurice. L’équilibre est difficile à trouver. Chez nous, il passe par la conduite en lots, la culture de l’herbe, le pâturage ou les coproduits qui permettent de travailler depuis vingt ans sans concentrés de production. Il faut aussi s’entourer de conseils neutres et se former, notamment via les groupes d’échange. » Concrètement, le troupeau est scindé en deux lots, conduits en ration complète. L’hiver, les vaches à moins de 200 jours de lactation ont une ration avec 2,5 kg de racines d’endives, un aliment énergétique et très appétent à 17 % de MS, 8,2 kg de maïs, 4 kg de pulpe supressée, 4,5 kg d’ensilage d’herbe et 3 à 4 kg de correcteur, selon la valeur de l’ensilage d’herbe. Les fins de lactations ont jusqu’à 75 % d’ensilage d’herbe et 2 kg de correcteur, pour une production moyenne de 25,9 kg de lait/jour. Ainsi, près de 60 ha d’herbe sont fauchés au printemps et les éleveurs n’hésitent pas à multiplier les coupes au fil de la saison, en fonction de la pousse de l’herbe : des ensilages d’herbe précoces et préfanés en vue d’ensiler entre 40 et 45 % de MS, après application d’un conservateur. Une pratique qui permet d’obtenir régulièrement un fourrage à plus de 0,90 UF et plus de 18 % de MAT. La mise à l’herbe démarre mi-mars sur 6 à 10 ha de dérobées (RGI-trèfle incarnat) semés à l’automne avant un maïs. Puis, les vaches ont accès à 25 ha de pâture, avec toujours au moins une demi-ration à l’auge, avant de revenir à l’automne sur une dérobée (RGI-trèfle d’Alexandrie) semée après un escourgeon. Le suivi de l’urée du lait au pâturage permet d’ajuster le correcteur, avec un seuil de 250 g à partir duquel sa suppression peut être envisagée.
Les VHP patûrent de jour, les fins de lactation jour et nuit
Cette année, pour aller plus loin dans la maîtrise des coûts, la mise à l’herbe s’est également faite en deux lots : pâturage de jour pour les VHP, jour et nuit pour les fins de lactation, dans un contexte de troupeau en pleine croissance par renouvellement interne. Il compte à ce jour 140 vaches. Dans l’attente de la future stabulation robotisée, qui aboutira au regroupement de tous les animaux à Landrecies, une extension de l’ancienne stabulation a été construite : une aire paillée de 54 places pour 60 000 € de travaux. Une nurserie vient d’être mise en service (300 000 €). L’agrandissement est donc bien lancé. Cela entraînera une modification des pratiques, en particulier l’arrêt du pâturage « qui sera remplacé par de l’affouragement en vert, précise Christophe. Nous avons également prévu d’utiliser de l’orge aplatie au robot. Mais il y aura néanmoins une augmentation du coût de production inhérente à ce projet. L’enjeu, dans un contexte de volume non limitant, sera de compenser par une hausse de la productivité permise par les robots. »
À Landrecies (Nord), dans l’Avesnois.
Gaec du Bois Lecomte à 4 associés : Maurice et Maria De Deken (60 ans), leur fils Christophe (28 ans), Camille Meurant (60 ans), et un salarié, Anthony Petit.
900 000 litres de lait livrés à la coopérative belge Milcobel.
140 holsteins à 8 081 litres de lait, 39,2 de TB et 33,6 de TP.
Deux poulaillers de 1 200 m².
174 ha de SAU : 51 ha de blé, 20 ha d’escourgeon, 11 ha de colza, 9 ha de betteraves sucrières, 21 ha de maïs, 45 ha de prairies permanentes et 17 ha de prairies temporaires. Les terres limoneuses offrent un potentiel de 18 t de MS en maïs ensilage et 90 q de blé.







